samedi 26 janvier 2008

Avesnes - l'abbé J.-F. Decorde





M. P. de la Mairie pense que le nom de cette commune vient du gaulois Abhain ou Avhain, qui signifie fontaines et convient parfaitement aux nombreuses sources qui se trouvent sur le territoire d'Avesnes. Pour nous, nous savons seulement que cette paroisse, comme plusieurs autres du canton, dédiées à saint Martin, est fort ancienne. Notre savant maître, Auguste Le Prevost, si promptement enlevé à l'affection de ses amis, a démontré que les églises qui ont saint Martin pour patron sont ordinairement d'une origine très ancienne et au moins mérovingienne [notes sur les communes du département de l'Eure, page 8].

On lit, dans un manuscrit que nous aurons souvent l'occasion de citer, qu'il existait , en 1197, à l'extrémité orientale du cloître des chanoines de Gournay, une maison en pierre, ayant appartenu au chevalier Hugues d'Avesnes, qui la vendit, en 1200, à Pierre de Vardes, de Uardes, pour la somme de douze deniers, ou une paire d'éperons d'argent, parce que le uendeur et ses successeurs pourroient y jouer aux échets, toutes fois et quantes, sans rien payer. En cette même année, Hugues d'Avesnes, de concert avec Avoie, sa femme, et Jean, son fils, donna une partie des dîmes et le patronage de l'église aux chanoines de Gournay, qui dans la suite nommèrent à la cure. Cette donation fut confirmée, en 1204, par Gautier le Magnifique, archevêque de Rouen, et par le pape Alexandre IV, en 1254. Il donna encore aux mêmes chanoines un muid de blé et deux muids d'avoine, à prendre tous les ans sur la dîme d'Avesnes ; donation qui fut approuvée par l'archevêque Eudes Rigault en 1269. On voit par une bulle du pape Alexandre III, donnée en 1190, que l'abbaye de Saint-Germer possédait aussi deux parties de dîmes à Avesnes, apud Avenas, duas partes majoris decimae.

Outre Hugues d'Avesnes, on cite encore, comme possesseurs du fief de haubert de ce lieu, Garin, Jacques, Bertin, Richer et Guillaume. Au XVème siècle, la seigneurie passa à Jacqueline d'Estouteville. En 1461, Jean d'Estouteville la donna à Charles VII. Plus tard, elle fut possédée par Robert des Hayes. En 1726, elle appartenait au sieur Legendre. Avant la révolution, le dernier seigneur fut un Montmorency.
Le plus ancien curé connu de cette paroisse est Pierre Asselin, qui a souscrit, en 1200, à la charte de donation de Hugues d'Avesnes dont nous avons parlé plus haut. Il eut pour successeur le prêtre Symon, nommé par Robert Poulain qui devint archevêque de Rouen en 1208. La cure valait alors quinze livres, et il y avait environ soixante paroissiens ou communiants, pro cca Lx [Collonnere de Mons. Larchevesque O. Rigault, fol. XCIII]. On pourrait aussi considérer le mot paroissien comme signifiant un chef de maison. Alors soixante paroissiens seraient synonymes de soixante feux.

Il parait que la commune d'Avesnes a été érigée en succursale ; mais son titre ne lui a pas été conservé. En 1813, elle devin t une dépendance de Gournay, ainsi que Ferrières et Ernemont. Aujourd'hui, c'est une chapelle vicariale réunie à Ernemont-la-Villette.

L'église d'Avesnes venait d'être couverte en ardoise, quand nous l'avons visitée (1859). Elle est desservie par M. le curé d'Ernemont ; mais l'on n'y fait l'office paroissial que le jour du patron. Or, comme saint Martin est patron de deux paroisses, on fête, à Avesnes, la saint Martin d'été. Qui croirait que, pendant quelque temps, cette paroisse a été réunie à Ferrières ? Quel éloignement !

L'église est assez bien tenue ; mais les réparations qu'elle a subies lui ôtent tout caractère archéologique. On voit, dans la nef, une statue de sainte Barbe. Cette sainte avait été choisie, dans la contrée, pour patronne par les confréries chargées du transport des morts.

La commune d'Avesnes a conservé son presbytère, qui pourrait facilement être disposé pour le logement d'un prêtre. Il y a un jardin et un petit herbage au bas duquel se trouve un étang abandonné.

Le principal hameau d'Avesnes est le Cottendray, où se trouvait un quart de fief appartenant originairement aux seigneurs de Gournay. A la fin du XVème siècle, marie de Bourbon le vendit à Jean Potin, frère de Henri Potin, évêque de Philadelphie, dans la famille duquel la propriété est restée Elle appartient aunourd'hui à M. Potin de la Mairie, de Gisors, auteur de plusieurs ouvrages estimés sur Gournay et ses environs. Le spirituel écrivain a fourni pendant longtemps aux journaux des articles très recherchés. En 1682, on découvrit dans une terre du domaine de Cottendray huit à dix tombeaux en pierre formés de deux pièces, y compris le dessus. On ne trouva rien à l'intérieur qui pût renseigner sur leur origine. Comme le lieu dans lequel ils furent découverts portait le nom de Clos aux Anglais, nous pensons avec M. de la Mairie qu'on aura peut-être inhumé là des chevaliers tués pendant nos guerres avec l'Angleterre [Supplément aux recherches sur Gournay, page 378].

C'est dans le manoir de Cottendray que naquit, le 18 novembre 1596, Pierre Potin, qui fut pourvu en cour de Rome de la cure de Notre-Dame de Gournay, le 5 avril 1620, et qui ne put en prendre possession que le 30 juin 1623, par suite du procès qu'il eut à soutenir contre les chanoines, qui avaient nommé Louis Duhamel. Quand le Parlement eut rendu son arrêt, Pierre Potin alla prêter serment d'obédience à ceux qui venaient de succomber devant la justice. Cependant la paix n'était pas faite, et, dès l'année 1624, le nouveau curé de Notre-Dame fit assigner Jean Quatre-Sols, doyen de la collégiale, au sujet des dîmes de sa paroisse. L'affaire fut réglée par arrêt du 23 janvier 1625. Le calme dura douze ans. Alors survint une nouvelle querelle, au sujet des prédicateurs. On envoya une députation à la duchesse de Longueville, afin de la prier de rétablir l'ordre des sermons, et l'archevêque de Rouen, François 1er de Harlay, dans une visite qu'il fit, à Gournay, le 30 avril 1638, dut donner un règlement à ce sujet, d'après lequel il était défendu de prêcher à la même heure dans les deux églises de la ville. Pierre Potin, après avoir vieilli dans les combats, prit la résolution de se livrer au repos, et laissa plusieurs souvenirs de son passage à la cure. Il établit la confrérie du Rosaire, fit construire une sacristie à ses frais, et ajouta une cloche aux trois grosses que possédait déjà la paroisse. Après avoir été curé de Notre-Dame pendant vingt ans, il résigna son bénéfice en faveur de Louis Rousselin, un de ses neveux, et mourut le 12 Juin 1653 ; Il fut inhumé dans le chœur de son ancienne église, avec la permission du chapitre. Il parait que le sol d'Avesnes n'était pas propice aux chanoines ; car Jacques Cordier, qui devint curé de Notre-Dame après Louis Rousselin, et qui eut aussi de grands démêlés avec les chanoines, était curé d'Avesnes au moment de sa promotion. La cure d'Avesnes valait alors cinq mille livres de revenu [Histoire de Gournay, par M. de la Mairie, tome II, pages 54, 60, 64, 67 et 68].

Au XVème siècle, Jacques Lolong était seigneur du hameau de Longfin. La Houssoye, autre hameau d'Avesnes, rappelle Hugues de la Houssoye, qui donna au chapitre de Gournay, en 1192, une partie de dîmes à Ferrières et le hameau de mechon. De son côté, Bernard de Fumechon fit quelques donations à l'Hôtel-Dieu de Gournay en 1243 et en 1267.

Hameaux : Ridonne, la Côte, la Houssoye, le Mesnil, Cottendray, les Bruyères, les Aulnets, Long Fin, Côte des Carreaux. Population : 321. MM. Langlois, maire ; Baudart, adjoint ; N. , curé ; Martel, instituteur.

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